La civilisation industrielle que nous connaissons depuis seulement 150 ans est gérée par un système étatique complexe et envahissant. Dans notre pays, malgré ses 11.000 lois et 127.000 décrets réglementant les moindres actes de notre vie sociale, professionnelle et privée, l’Etat-tout-puissant est pourtant en passe d’échouer sur les deux principaux objectifs qu’il s’est lui-même fixé : 1. maintenir la croissance 2. résoudre les problèmes de société.
Au plan économique, la stagnation du PIB est désormais une situation acquise depuis 10 ans et la survenance de la décroissance devient de plus en plus probable dans les prochaines années, d’autant que la raréfaction des ressources fossiles et minérales ne semble pas devoir être compensée par quoi que ce soit d’équivalent en facilité d’obtention et pouvoir énergétique.
Au plan sociétal, la liberté individuelle est malmenée par l’application difficultueuse de 74 codes juridiques régissant notre quotidien. Il suffit de savoir qu’un code peut atteindre 2.500 pages, que le code général des impôts contient à lui seul 4.000 articles, que plus de 10% des articles d’un même code sont modifiés chaque année et que les amendements parlementaires sont passés de 43.437 entre 1993 à 1997, à 50.957 entre 1997 et 2002, pour atteindre 243.259 durant la XIIe législature (2002-2007), témoignant ainsi de la folie actuelle du droit dans notre société étatique et conduisant le citoyen moyen à une situation paradoxale d’insécurité juridique.
Pour compléter le tableau, le système de création monétaire ex nihilo par les banques est menacé d’implosion à très court terme, puisqu’il ne repose que sur une confiance susceptible de se déliter à tout moment. Déflation économique, inflation législative et dérive monétaire constituant incontestablement les trois piliers vermoulus de l’édifice notre société actuelle, le temps semble donc venu d’imaginer un nouveau système d’organisation sociale susceptible de prendre le contre-pied de ces paramètres négatifs et mortifères.
Le système actuel ne permet malheureusement pas à un mouvement porteur d’une telle ambition de s’exprimer et encore moins de prendre le pouvoir. L’organisation politique et les règles législatives en vigueur interdisent la diffusion d’un projet global de transformation de la société et confinent ses contempteurs à des rôles anecdotiques d’activistes, de colporteurs de slogans, d’aimables jouteurs verbaux, finalement, de nécessaires poils à gratter d’un système qui peut dormir sur ses deux oreilles, serein. En l’absence de programme complet, cohérent et basé sur des principes affirmés, toute démarche militante ne peut, en effet, que se traduire par une gesticulation souvent improductive et fatalement équivoque. Le changement de paradigme défini plus haut ne pourra se concrétiser qu’au sein d’un projet politique complet destiné à être mis en œuvre par l’intermédiaire d’une Constitution nouvelle. Il est cependant peu probable que la classe politique professionnelle actuelle accepte de se saborder en engagent volontairement une démarche de refondation constitutionnelle. C’est pourquoi, il convient de tourner vers le peuple afin qu’il puisse réapproprier le pouvoir confisqué par l’oligarchie politique. Sachant que le référendum d’initiative populaire n’existe pas en France, l’action militante inclura accessoirement une alliance purement circonstancielle avec tous ceux qui militent pour l’adoption de cette mesure technique, qui est la seule à ouvrir la possibilité d’une véritable révolution non violente, en permettant l’adhésion populaire à une révision fondamentale de la Constitution.
Un projet de Constitution nouvelle doit donc être mis en chantier dès maintenant, qui ne devra en aucune façon être considéré comme un schéma tout tracé, et encore moins péremptoire. Il convient d’élaborer une ébauche, un canevas, une base de départ destiné à subir une finalisation concertée par tous ceux qui seront intéressés par cette démarche. Cette première mouture d’amorçage devra naturellement être discutée, modifiée et amendée par un débat contradictoire qui pourrait s’étendre sur plusieurs années. Par ailleurs, et compte tenu de la faillite annoncée des principales idéologies orchestrant la vie sociale actuelle, il paraît indispensable de rejeter tout ancrage, référence ou appartenance politique à quelque point cardinal habituellement revendiqué. Dès lors, le traditionnel clivage droite /gauche, ainsi que la référence à des valeurs attachées à telle ou telle sensibilité politique deviendront obsolètes et, pour tout dire, hors sujet.
Ce projet doit être celui d’une société de liberté, rejetant les dérives tant capitalistes que socialistes, tant individualistes que collectivistes. Et surtout, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, ce projet devra viser à construire une société fondée sur la réalité d’un individu responsable en devenir, plutôt que sur l’illusion d’un état vertueux dont la déconfiture en cours a déjà sonné le glas.